L'Oppidum du Grézac à Lodève




Il se situe à 2,5km au N-O de Lodève.
C’est un habitat de hauteur et de pente, édifié sur un puech culminant à 506m, résultat d’un glissement de terrain bien antérieur à la présence de l’Homme néolithique en ce lieu.


 Emplacement de l'oppidum du Grézac, à Lodève

Emplacement de l'oppidum du Grézac, à Lodève-Puech au centre de la photo


Il est dominé au nord par le plateau calcaire jurassique du Grézac, prolongement S-E du causse du Larzac.
Cet oppidum est fortifié naturellement par des falaises ou de grands blocs rocheux, et par une muraille construite à pierre sèche.


Rempart N-O de l'habitat de hauteur fortifié 

Une portion du rempart Est


Ce rempart abritait des cabanes constituées en village par les habitants de la période bronze final III/1er âge du fer (VIe siècle avant notre ère environ).
Des sondages et des prospections ont été effectués par le Groupe Archéologique Lodévois (G.A.L.) depuis une soixantaine d’années. Ils ont révélé que l’un des habitats de hauteur du Grézac, « l’oppidum », a été occupé d’une façon plus ou moins continue et intensive du néolithique moyen (-4000 environ) au haut moyen âge (+600 environ).
Les recherches font apparaître que l’occupation la plus longue et la plus dense a eu lieu à l’époque charnière bronze final III/1er âge du fer (VIe siècle avant notre ère environ).
Il apparaît également que le site a été occupé au haut moyen âge (fin époque romaine/VIème siècle de notre ère environ).
Au pied sud du puech supportant l’habitat, un vieux chemin, qui n’est plus utilisé que par les « promeneurs et les chasseurs post néolithiques », rejoint, 800m à l’ouest, la route antique venant de Saint Thibéry (Cessero) sur la voie domitienne, passant par Lodève (l’antique Luteva), conduisant à Millau (Condatomagus) et dans le nord de la Gaule.


Emplacements des tables de broyage de céréales,
trouvées lors de prospections sur le site (points rouges)


A l’ouest de l’oppidum, au dessus de la route antique, une construction a été érigée à l’époque romaine, sans doute pour contrôler et surveiller la circulation des personnes et des biens entre la plaine méditerranéenne, le piémont, les causses et le massif central. Notamment l’important commerce de poterie sigillée entre les officines de production de la Graufesenque (Millau/Condatomago), Lodève (Luteva), les ateliers de Salelles-du-Bosc (le Pétout), le sud de la Gaulle, l’Italie, l’Espagne.
Egalement sur le versant ouest du puech, se trouve une cavité naturelle, dissimulée sous un éboulis rocheux, dans laquelle ont été découvertes des armatures de flèches en silex et de nombreux fragments de poterie. Une vingtaine de récipients de ceux-ci ont été reconstitués par le dessin et les périodes d’utilisation de cette grotte ont ainsi pu être datées du néolithique moyen (-4000 avant notre ère environ) au 1er âge du fer (Vie siècle avant notre ère). De l’eau d’écoulement a pu être recueillie dans cette cavité (grotte-citerne) qui est sèche de nos jours.
Il est à signaler que deux sources pérennes se trouvent non loin du puech abritant les habitats.

Dans les années quarante, des sondages effectués par Dom F. Hébrard et M. Louis, avaient alors révélé des occupations, du néolithique au haut moyen âge. Un sondage effectué dans une des habitations avait montré, sur des niveaux néolithiques, une activité humaine importante au 1er âge du fer, et au haut moyen âge.


C’est une évidence : le Grézac, et sans doute Lodève, entre Lergue et Soulondres, étaient fortement peuplés à l’arrivée des envahisseurs romains. Ces populations autochtones, les lutevani, étaient issues des Hommes du néolithique nombreux dans le Lodévois. Sans doute, comme leurs voisins les rutènes, ont-ils été soumis moins facilement que les habitants de la plaine, d’où une occupation un peu plus tardive des romains.
De nombreux habitats de hauteur du 1er âge du fer lodévois mériteraient que les «officiels» enfin, s’y intéressent, mais ils sont difficiles d’accès… ( les  officiels et les sites…)
Sur le puech du Grézac, on peut cependant noter, grâce aux sondages et prospections de «bénévoles amateurs», la richesse des documents archéologiques découverts :

- pour le néolithique (préhistoire – 4000 ans environ avant notre ère) : voir photos

Ø  récipients en terre cuite

         
Fragment de vase citerne avec élément de préhension et cordons. Terre cuite-Préhistoire.


Bol caréné- Préhistoire.

Ø  armatures de flèches et outils en silex  

Fusaïoles en terre cuite - Petit bol décoré - Perles en verre - Pointes de flèches en silex.

Ø  haches en pierre
Ø  meules en basalte


- pour le bronze final/1er âge du fer (VI èmè siècle environ, avant notre ère) : voir photos

Ø  100 grands fragments de meules en basalte
Ø  des dizaines de kilos de tessons en terre cuite, témoins de centaines de récipients de toutes fonctions

Bol décoré ; bronze final

 Céramique décorée - Bronze final-1er âge du fer

Petit bol votif en terre cuite

Ø  une sole de four en terre cuite
Ø  des fusaïoles en terre cuite (témoins de tissage)

 Fusaïoles de tissage de la laine, en terre cuite

Ø  des perles en verre, des aiguilles en bronze
Ø  plus de 20 disques en tôle de bronze martelé à décor perlé. Peut-être parure féminine? (cf. Bourgogne avril-mai 2004 n°55 page 87). L’oppidum du Grézac est placé en 2ème position sur 27 sites étudiés, au regard du nombre de ce type d’objets découverts en Gaule Méridionale. (lire Lodève Antique LUTEVA. voir sources).

Disques à décor perlé embouti, en alliage de cuivre - Anneaux moulés, en bronze

Ø  des anneaux moulés en bronze 

 Bracelet décoré, en bronze - Anneaux moulés, en bronze - Bague

Ø  des bracelets en bronze

 Mobilier en alliage de cuivre (Bol, bracelets, épingles, fibules, mordant de ceinture, ardillon, outils...)

 Bracelet décoré, en bronze - 1er âge du fer

Ø  l’extrémité d’une épée, ou poignard, en bronze (collection Dom Fulcran Hébrard)                              
Ø  une plaque boucle décorée en bronze
Ø  des perles
Ø  des fragments d’objets divers…


- et un rocher gravé de signes, parmi lesquels on peut reconnaître des « crosses » (Gallia préhistoire 1963. Pages 240 et 241. Groupe Archéologique Lodévois  - GB Arnal). 

Rocher gravé - On peut reconnaître surtout des 'crosses' (photo G.B. Arnal)


pour la fin de la période gallo-romaine / époque paléochrétienne / tardo-antique (voir photos)

Ø  tessons de terre cuite sigillée
Ø  très nombreux tessons de DSP (Dérivées des Sigillées Paléochrétiennes, dites aussi
    wisigothiques ou tardo-antiques)

Céramique 'paléochrétienne' (ou tardo antique) décorée de rouelles et de palmettes

Ø  meules en basalte, pour le broyage de céréales
Ø  amphores,  tuiles
Ø  pièces de monnaie

Aes 3.4 de Constance II 337-361 

As de Constantin le Grand-1ère officine de Lyon (307-337)

Ø  un moule à rivets en grès ( collection Dom Fulcran Hébrard )
Ø  un moule pour fondre le minerai, en argile
Ø  clous en fer, sonnailles

Objets en fer (outils, boucle de ceinture, couteaux, clous) 

Sonnailles en fer et cuivre (fragments)

Ø  fibules (agrafes) en bronze 

 Fibules (agrafes) - Epingles, en alliage de cuivre


Ø  une pointe de flèche à douille, en fer ( collection Dom Fulcran Hébrard )
Ø  fragments d’objets divers, en verre, en os, en fer, ou en alliage de cuivre





Pour résumer :
Les habitats de hauteur du puech du Grézac montrent donc, en l’état actuel de nos connaissances, une certaine continuité d’occupation, depuis le néolithique moyen (chasséen) au haut moyen âge (4000 ans avant /VIe siècle de notre ère).
Cependant, la période de présence et d’activités humaines la plus importante semble avoir été l’époque protohistorique bronze final III/1er âge du fer (VIe siècle avant notre ère). Cette population, sans doute constituée en chefferies, était abritée par des fortifications artificielles (rempart) et naturelles (falaises). Elle était issue du peuplement préhistorique du Lodévois additionné de groupes d’immigrants venant du nord-est et du sud de l’Europe. De très nombreux sites pré et protohistoriques du Lodévois l’attestent (habitats et tumulus de l’âge du fer). Ils vivaient, d’après les vestiges et les restes culinaires découverts, de cueillette, d’élevage, de chasse et d’agriculture. Ils pratiquaient le commerce, l’artisanat, exploitaient des gisements miniers proches. 

Ancienne mine de  cuivre, plomb, argent, et bassin de lavage - Lodève

Ces femmes et ces hommes avaient pris position sur le puech du Grézac, bien situé pour leur défense, leur sécurité et la surveillance. Cet emplacement est très bien abrité des vents souvent froids du nord, par les hautes falaises du causse du Larzac. Une sépulture datée du bronze final/âge du fer, a été découverte dans une anfractuosité d’une falaise. Elle a livré des bracelets en bronze, une pointe de flèche et des ossements humains.

Sépulture falaise Grézac

Près de Lodève, il existe également de nombreux habitats de hauteur (oppida) contemporains de celui du Grézac, notamment à Saint Etienne-de-Gourgas, Pégairolles-de-l’Escalette, Octon, Mérifons, Saint Saturnin…







SOURCES :

-Maurice LOUIS, directeur de la XIème Circonscription des Antiquités Préhistoriques, et Dom F. HÉBRARD. « L’HABITAT PRÉHISTORIQUE DU GRÉZAC (Commune de Lodève-Hérault) ». Cahiers d’Histoire et d’archéologie. Nouvelle Série, Nos 15 et 16. 1949.  
-L. MARTIN, A. NOURRIT , A. DURAND-TULLOU et G.B. ARNAL. « LES GROTTES-CITERNES DES CAUSSES- Grotte de l’oppidum du Grézac (Lodève)  ». GALLIA PRÉHISTOIRE, tome VII. 1967.
-Dominique GARCIA. « ENTRE IBÈRES ET LIGURES. Lodévois et moyenne vallée de l’Hérault ». Revue Archéologique de Narbonnaise, supplément 26. CNRS éditions. 1993.
-Dominique GARCIA et Daniel ORLIAC. « BASSINS ET DISQUES EN BRONZE A DÉCOR PERLÉ DU BASSIN MOYEN DE L’HÉRAULT ». Archéologie en Languedoc, 3. 1986.  
-Laurent SCHNEIDER, Dominique GARCIA. « CARTE ARCHÉOLOGIQUE DE LA GAULE. LE LODÉVOIS 34/1 ». Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Ministère de la Culture. 1998.
-GROUPE ARCHÉOLOGIQUE LODÉVOIS. « Prospections sur le terrain depuis 1954 ». (Mobilier archéologique découvert, visible au dépôt de fouilles, 10 rue Denfert à Lodève).
-Gérard  MAREAU, Maurice CAUVY, Blandine CASTANIER. « LODÈVE, L’ANTIQUE LUTEVA. Fouilles archéologiques-Oppidum du Grézac-Gallo romain-Château de Montbrun-Moyen âge ». Editions du Centre Hérault. 2009.
-Maurice LOUIS, Odette et Jean TAFFANEL. « LE PREMIER ÂGE DU FER LANGUEDOCIEN. Ière partie, LES HABITATS ». Institut d’Études Ligures.  Bordighera, Montpellier. 1955.
-Michel PY. « LES DISQUES PERLÉS EN BRONZE, DU LANGUEDOC ORIENTAL ». Revue d’études ligures, XXXVIII. 1972.
-Michel PY. « LA LIQUIÈRE, VILLAGE DU PREMIER ÂGE DU FER EN LANGUEDOC ORIENTAL ». Revue Archéologique de Narbonnaise, supplément 11. 1984.
-Catherine TENDILLE. « MOBILIERS MÉTALLIQUES DE LA RÉGION NIMOISE, autres objets de parure et d’habillement ». III, DAM 3. 1980.
-Gaston Bernard ARNAL et GROUPE ARCHÉOLOGIQUE LODÉVOIS. « Chapitre Informations Archéologiques, LODÈVE, pages 240 et 241 ». Gallia Préhistoire. 1963.
-GROUPE ARCHÉOLOGIQUE LODÉVOIS. « OPPIDUM DU GRÉZAC ». Gallia Préhistoire, tome VII, pages 126 à 129. 1967.
-Gabrielle DÉMIANS D’ARCHIMBAUD (sous la direction de…). « L’OPPIDUM DE SAINT- BLAISE du Vème au VIIème s.). Documents d’Archéologie Française n° 45. Ministère de la Culture, Ministère de l’Enseignement Supérieur, CNRS. Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, Paris.1994.





















1 commentaire:

  1. On aimerait savoir pourquoi vous manifestez une certaine "hargne" envers ceux que vous appelez "les archéologues officiels". Quels sont leurs méfaits ?

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